L’inclusion professionnelle du handicap chez Rigolo Comme La Vie – témoignage de Emilie Blancon animatrice petite enfance

L’inclusion est un engagement fort de Rigolo Comme La Vie car elle participe à la reconnaissance des compétences et particularités individuelles. Emilie, animatrice petite enfance, sourde de naissance, est une professionnelle de la crèche Rigolo Comme La Vie d’Orchies.

Découvrez son témoignage, quand dynamique inclusive et volontée collective sont partagées.

Je m’appelle Emilie, je suis sourde de naissance. J’ai été appareillée à l’âge de 8 mois et suis à présent malentendante. Cela signifie que je sais parler mais je n’entends qu’avec mes appareils et dans un environnement calme. Je vis en couple avec mon mari qui lui est sourd profond. Nous pratiquons la langue des signes (LSF) et nous avons 2 filles de 12 et 9 ans, qui ne sont pas sourdes.

Quel est ton parcours professionnel ?

Je suis titulaire du CAP Petite enfance depuis 2007. Grâce à ce diplôme, j’ai fait des centres aérés pendant 2 étés. Puis j’ai été embauchée à la crèche d’Orchies en 2009 en tant qu’animatrice.
A mes débuts de vie professionnelle, je ne me suis pas sentie accompagnée ni intégrée dans l’équipe. Je me suis finalement vite retrouvée en tant que “lingère” et je m’occupais principalement de circuit de linge dans la crèche et de certaines missions de nettoyage.

Mais depuis que la crèche a été reprise par le réseau Rigolo Comme la Vie en 2015, mes missions et la place que l’on m’accorde ont changé.

Au fur et à mesure, j’ai eu ma place en tant qu’animatrice auprès des enfants
tout en étant accompagnée par mes collègues et ma direction.

Aujourd’hui comment se déroule ton quotidien en crèche ?

Mon quotidien en crèche s’articule sur deux axes :

• • Le premier autour de l’accompagnement des enfants. Je participe pleinement aux temps du quotidien, c’est-à-dire : repas et goûter des enfants, changes, accompagnement au sommeil. Je suis également inclue dans les temps d’éveil et je peux par exemple proposer des ateliers à un petit groupe d’enfants, ou participer aux temps collectifs comme les comptines. J’apprécie particulièrement être avec les enfants, les aider à grandir et être présente au quotidien pour eux.
  • Le deuxième s’articule autour des missions complémentaires d’entretien et nettoyage nécessaires au bon fonctionnement de la crèche comme mes autres collègues (comme par exemple, préparer le goûter, nettoyer et laver le frigidaire chaque semaine, assurer le lavage des sur-chaussures pour les parents…).

Y a t’il des spécificités mises en place dans la crèche pour toi ?

De part mes fonctions et mon handicap, j’ai un contrat de 20h par semaine et travaille avec un planning horaire fixe : 11h-16h30 sauf le mercredi. Ces horaires me conviennent afin de pouvoir participer à la vie de la crèche chaque jour tout en respectant les spécificités de mon rythme de vie.

Comment Rigolo Comme la Vie participe à ton inclusion professionnelle ?

Je me sens intégrée au sein de la crèche. Cela est possible grâce à un accompagnement au quotidien de la part de mes collègues. Lorsque j’ai manifesté mon envie de travailler davantage auprès des enfants afin de modifier mon quotidien, je me suis sentie écoutée.

Je suis beaucoup accompagnée de Coline, directrice adjointe de la crèche, qui m’a donné confiance en moi. Nous avons travaillé ensemble sur mon “déroulé de journée type” qui m’a apporté des repères dans l’organisation de ma journée.

Mes collègues sont des ressources pour moi. Cela m’aide à me sentir bien au travail.
Je trouve que mon intégration est une belle réussite collective.

Je crois que je suis la seule malentendante à travailler en crèche dans mon entourage. Beaucoup de mes copines aimeraient le faire mais ne peuvent pas. Il faut savoir observer, parler avec les enfants et entrer en interaction avec eux… La communication est importante avec les enfants.

Chez Rigolo Comme La Vie, le baby-sign associé à la parole fait partie des incontournables de notre pédagogie. On me demandait de signer auprès des enfants comme je maîtrise la langue des signes française (LSF). Mais je ne comprenais pas pourquoi signer avec eux alors qu’ils peuvent entendre ! On m’a alors proposé de participer à la formation baby-sign associé à la parole pour comprendre le sens. Maintenant je sais que les enfants comprennent mais ne savent pas parler, c’est pourquoi pratiquer le baby-sign les aide à communiquer. A présent, je signe beaucoup plus avec les enfants et j’apprécie les voir utiliser les signes en retour..

Aussi, mes collègues me sollicitent régulièrement pour que je leur montre certains signes moins faciles.
C’est valorisant !

Concrètement comment ça se passe lors des temps collectifs, en formation ou lors des ateliers avec les familles ?

Je participe à un maximum de temps festifs de la crèche : fête de l’été, semaine du goût…. Cette année, en lien avec notre projet pédagogique, j’ai pu participer à 2 ateliers parents-enfants. C’était nouveau pour moi et très intéressant ! Avec mes collègues, nous avons adapté le déroulé des ces ateliers tant sur l’animation que sur l’utilisation du baby-sign. Les parents ont apprécié cette formule et m’ont posé beaucoup de questions. A mon tour, j’ai pu leur expliquer l’importance de signer pour la communication.

De part mon handicap, il est difficile pour moi de participer aux réunions d’équipe. En groupe, les échanges sont trop vifs et je n’arrive pas à suivre. Après chaque réunion, Coline me fait un compte rendu des éléments à savoir.

Néanmoins, Rigolo Comme la Vie me permet de participer à la journée pédagogique. C’est le rdv annuel incontournable où tous les collaborateurs sont présents et nous bénéficions de conférences et d’ateliers qui nous permettent aussi de continuer à nous former en tant que professionnels.. Ça fait beaucoup de monde ! Le réseau a tout prévu :  un interprète m’accompagne dans la journée et signe les interventions.

L’année dernière j’ai pu assister à la conférence de Jean Epstein, c’était super ! Il a su imager des éléments théoriques avec humour… L’interprète a su signer l’humour, c’était agréable pour moi de rire comme les autres !

Ca m’aide vraiment pour me sentir appartenir au collectif des collaborateurs Rigolo Comme La Vie. 

Quels conseils ou astuces donnerais-tu à des jeunes malentendants qui souhaitent devenir professionnels de la petite enfance mais qui n’osent pas ?

Il ne faut pas hésiter à en parler autour de soi, à frapper aux bonnes portes et ne pas avoir peur de se lancer… ou même de se relancer ! C’est-à-dire, insister et prouver la volonté de vouloir travailler auprès des enfants.
J’invite également les malentendants à ne pas avoir peur de communiquer avec les entendants. On peut signer en même temps. Ce n’est pas grave si les personnes ne comprennent pas tous les signes. Les entendants peuvent d’adapter et apprendre les signes aussi.
Dans l’équipe, mes collègues se sont adaptés à moi et à mon handicap. C’est important de se sentir accompagné.

Quels seraient les messages que tu voudrais partager après ce témoignage ?

Malgré ma surdité, je vis comme tout le monde. J’ai réussi à faire de mon handicap, une force au quotidien notamment avec l’utilisation du baby-sign qui est important dans le quotidien des enfants. Je souhaite à tous les malentendants qui le souhaitent de pouvoir entrer dans la petite enfance car malgré la demande d’attention constante, c’est un milieu joyeux composé de très beaux métiers pour l’enfant ! C’est un plaisir quotidien !